La naturopathie en France - Comment faire une place à la naturopathie et devenir un bon naturopathe ?
Récemment sous le feu de la critique et du scandale, la naturopathie n’a pas bonne presse aujourd’hui en France. Pourtant, nous constatons une véritable demande du public pour une médecine plus humaine, plus intégrative, à l’écoute de ses patients et de leurs besoins.
Débordés, et enfermés dans un système qui ne les entends plus, les médecins souffrent d’un manque cruel de temps et de moyens pour recevoir et traiter convenablement leurs patients. Ceci se tournent alors vers des médecines dites “alternatives” : naturopathie, sophrologie, acupuncture, tout autant de techniques dites “douces” et “naturelles”, mais qui peuvent surtout se targuer d’accorder du temps et de l’écoute à ceux qui en font usage, chose désormais en voie de disparition dans la médecine conventionnelle.
Mais ce phénomène est-il la résultante d’une simple crise de notre système de santé ou bien le signe d’une problématique plus profonde ?
Pourrions-nous faire une place à ces médecines nouvelles, qui prônent un retour aux sources et une prise en charge globale du patient ? Avons-nous la capacité de faire progresser notre vision de la médecine, afin d’offrir le suivi le plus complet et qualitatif possible ? C’est en tout cas le pari lancé par ces nouveaux praticiens.
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La naturopathie souffre d’une image dégradée par de nombreux scandales et dérives en tout genre. Pourtant, son intention première est louable, et fut autrefois le rôle du médecin de famille : informer et éduquer les patients à une hygiène de vie correcte, permettant la pleine vitalité et la pleine santé.
Contrairement à ce que certains praticiens peu scrupuleux peuvent avancer, la naturopathie n’a pas pour but de guérir, mais plutôt d’accompagner le processus de soin et de guérison par une mise en place d’un plan d’hygiène vitale, censé guider le consultant vers un mieux-être. La supplémentation en produits et excipients naturels n’intervient qu’en deuxième intention et ne doit pas entrer en conflit avec d’éventuels traitements mis en place par le médecin.
Le naturopathe ne se joue pas médecin, car des médecins il y’en a; il doit intervenir en soutien afin de complémenter la prise en charge classique, de prendre le temps d’écouter, de comprendre et d’analyser la vie et les habitudes de son consultant et de le conseiller au mieux pour améliorer sa problématique. Le naturopathe est un hygiéniste, et un éducateur avant tout.
Voilà pourquoi la médecine douce est profondément utile à notre système de soin : car elle vient non-seulement combler ce que la médecine conventionnelle ne fait pas, ou plus par manque de moyens ou de temps mais aussi, prend le temps d’éduquer le public à la bonne santé ; besoin nécessaire à l’ère des maladies de société liées à notre sédentarité, à notre régime pauvre en nutriments essentiels et à nos habitudes de vie destructrices.
Et c’est par un système en arborescence, fait de praticiens qualifiés et diplômés, tous interconnectés, que le patient peut être pris en charge de la manière la plus efficace possible.
Le problème de la qualification et la reconnaissance :
Le problème principal qui se pose aujourd’hui est le manque de contrôle et de structure autour de la profession ; celle-ci n’étant pas encadrée, n’importe qui peut se décréter naturopathe du jour au lendemain, sans devoir fournir une quelconque preuve de sa qualification. La mention “auto-didacte” doit être ajoutée lorsque le naturopathe est non-diplômé, mais en pratique cela est rarement le cas. Les formations courtes et manquant d’un socle de connaissances solides fleurissent partout : formation en cycle court (généralement 6 mois), avec aucune base scientifique ou anatomique et une approche légère de la prise en charge “patientèle”, donnent un semblant de légitimité à des praticiens qui manquent cruellement de pratique une fois diplômés. Les chiffres parlent d’eux même : seul 10% des étudiants en naturopathie finissent par s’installer en cabinet.
Le SPN (Syndicat des Professionnels Naturopathes) ainsi que diverses organisations et écoles tentent depuis des années d’engager un dialogue avec le ministère de la santé autour de l’encadrement de la profession, sans succès. Car bien que la naturopathie soit intégrée et exercée dans un cadre légal défini, celle-ci n’est pas reconnue comme médecine traditionnelle de première ligne, comme l'ont pourtant fait plusieurs pays (Afrique du Sud, Allemagne, Australie, Belgique, Chine, Danemark, Grande Bretagne, Irlande, Israël, Norvège, Pays Bas, Portugal, Russie, Suède, Suisse ainsi que le continent Indien, une douzaine d'États des USA et 5 provinces du Canada (la Colombie-Britannique, le Manitoba, la Nouvelle-Écosse, l’Ontario et la Saskatchewan).
Comment encadrer une pratique aussi large et parfois vague, composée de plus en plus de praticiens chaque année, tous formés dans une école différente et avec une vision unique de la profession ? Comment donner de la légitimité à sa pratique en tant que naturopathe, dans une société pourtant encline à les accueillir mais face à un système de soin profondément contre les médecines douces ?
Devenir un bon naturopathe - crédibiliser sa pratique :
Il n’y a pas de secret : seule une formation avec une solide base de connaissance et un accompagnement complet permet de devenir un bon naturopathe. On estime qu’une formation complète doit se situer aux alentours des 1500 h (niveau 3 de formation, ou le niveau le plus élevé).
Une pratique clinique auprès des consultants doit également faire partie de la formation, car tout comme n’importe quel professionnel de santé, seul le contact avec les “patients” permet d’affuter sa pratique. Enfin, la formation doit posséder une base scientifique complète, autre pré-requis afin de s’assurer de sa bonne légitimité.
En moyenne, une formation de 1500h se déroule sur 1 an et demi à 2 ans. Attention aux formations courtes (6 mois à 1 an) qui ne permettent pas d’être pleinement formé. Certaines accréditations particulières peuvent vous guider (accréditation FENA, OMNES, formation RNCP en France par exemple) ; ou bien se tourner vers les formations à l’étranger, dans des pays reconnaissants la naturopathie (le Canada par exemple).
Au-delà de la formation en elle-même, il y’a certains principes pouvant guider votre pratique et vous permettre de la crédibiliser :
S’en remettre à d’autres professionnels de santé - travailler en collaboration
Un bon système de soin c’est un système de soin interdépendant, s’appuyant sur l’expertise de tout un tas de praticiens spécialistes dans leur domaine. Ne pas avoir peur de dire que l’on ne sait pas et référer son consultant à un autre professionnel lorsque la problématique dépasse notre cadre de compétences, c’est faire preuve de sérieux.
2. Ne pas vouloir “soigner”, mais vouloir “prendre soin”
Le naturopathe ne soigne pas, il prend soin. Son rôle est d’éduquer son consultant à une hygiène de vie saine et de lui conseiller les bons gestes/remèdes. Nous ne prescrivons rien, nous ne diagnostiquons rien, nous ne soignons rien. Aucun traitement ne doit être modifié ou arrêté sans l’avis du médecin.
3. Faire preuve de rigueur et de sérieux - continuer de s’éduquer
Il est important de continuer de s’éduquer sur les dernières avancées et découvertes scientifiques, et toujours tenir ses connaissances à jour. L’éducation ne s’arrête pas à la graduation, mais continue toute la vie. S’informer, rechercher, s’éduquer, c’est réduire sa marge d’erreur et c’est prendre soin avec rigueur et sérieux de son consultant. Celui-ci place entre vos mains une responsabilité importante : celle de le conseiller et de prendre soin de sa santé ; il convient de respecter cela.
4.Eduquer les autres professionnels de santé à ce qu’est la naturopathie - éduquer le public
Au lieu de rentrer en confrontation avec le corps médical et de camper sur nos différends, cherchons à expliquer notre pratique, à l’étoffer de preuves scientifiques et concrètes et d’encourager le dialogue. Cherchons également à éduquer le grand public sur l'intérêt de la naturopathie et sur ses bienfaits.
Une nouvelle ère s’annonce pour notre système de santé, alors que la médecine progresse. La place de la médecine traditionnelle est aujourd’hui discutée et les bienfaits de cette approche peuvent être constatés, en témoignent les patients en ayant bénéficié. Demain nous aurons peut-être la capacité d’encadrer la profession et d’offrir au public une approche révolutionnaire de la médecine, savant mélange des connaissances d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Ne reste plus qu’à continuer de s’informer, de s’adapter et d’évoluer avec le monde qui nous entoure, promesse de tout autant de nouveaux défis et d’enjeux de santé publique à relever.
Auteure : Chiara Porte-Haquin, Naturopathe (N.D)
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